On vous propose un placement financier très attractif avec un gain rapide ? Attention, il s'agit certainement d'une escroquerie : un investissement fictif où votre argent ne sera en réalité jamais investi. L'escroc, lui, disparaîtra avec vos économies sans laisser de trace.
Ces offres prennent des formes variées et sont bien conçues, ce qui rend l'arnaque difficile à repérer.
Aujourd'hui, ces fraudes se multiplient, notamment sur Internet et les réseaux sociaux, et entraînent des pertes financières considérables pour les victimes. Apprendre à les reconnaître pour éviter de se faire piéger est devenu essentiel !
Un facebook live a été organisé avec l’Autorité des marchés financiers et 60 Millions de consommateurs le 10 octobre à 18h00.
Bonsoir, Laurence Ollivier, journaliste au magazine 60 millions de consommateurs.
Bienvenue sur notre Facebook live du jour consacré à l’épargne.
Avec nous, pour répondre à la question "Faux placements, vraies arnaques : comment vous protéger ?", j’ai le plaisir d’accueillir Florence Corne, de l’Autorité des marchés financiers (l’AMF).
Bonsoir Florence,
Bonsoir Laurence, bonsoir à tous,
Je vous rappelle le principe de notre live, vous nous posez vos questions et nous y répondons.
Florence, de quoi parle-t-on lorsque l’on dit arnaques aux placements ?
Une arnaque aux placements c’est une proposition d’investissement fictive, dans laquelle votre argent ne sera pas investi, il sera empoché par l’escroc et vous ne le reverrez pas. Les propositions sont très diverses et très bien faites, rendant l’identification de l’arnaque difficile.
Alors que l’épargnant croit placer son argent, en réalité il est victime d’un vol
Le phénomène est-il répandu ?
Oui malheureusement, les arnaques sont répandues en matière de placement, particulièrement sur internet et les réseaux sociaux. Et les pertes sont importantes.
Fin 2021, le Parquet de Paris avait estimé le préjudice global à 500 millions d’euros par an.
Quel est le montant moyen du préjudice pour les épargnants ?
Ceux qui contactent l’AMF pour des arnaques nous font part d’un préjudice moyen déclaré de plusieurs dizaines de milliers d’euros, par exemple 25 000 € environ sur les cryptos et 65 000 euros sur des faux placements verts cette année. Ces montants sont donc élevés, mais beaucoup se font aussi arnaquer sur des sommes plus modestes.
Quels sont les principaux arguments utilisés par les escrocs ?
Les escrocs vont jouer la carte du rendement attractif, d’un placement plus rentable que les placements traditionnels.
Ils privilégient certains types de placements pour tenter de vous arnaquer : crypto-actifs, Forex, éco-parkings et faux placements "verts" ou autres placements atypiques. Ils savent surfer sur les tendances et se renouveler.
Par exemple quand l’or ou le Bitcoin grimpent et font la Une du journal télévisé, très vite on voit fleurir des arnaques sur ces actifs…
Comment procèdent les escrocs pour attirer les épargnants dans leurs filets ?
Ils vont le plus souvent vous proposer un soit disant placement qui rapporte beaucoup, et sans risque. Par exemple un placement en cryptos qui vous rapportera plus de 10 % par an garantis. Ou encore de faux placements verts (hydrogène, énergies renouvelables, éco-parkings, etc) s’appuyant sur l’intérêt des épargnants pour la protection de l’environnement, et là aussi avec un rendement élevé garanti.
Pouvez-vous nous donner un exemple de technique employée par les escrocs ?
Les escrocs peuvent par exemple vous proposer des formations en ligne pour vous aider à investir en crypto-actifs ou à faire du trading. Mais on ne devient pas trader en quelques heures et l’investissement en crypto et le trading sont complexes et risqués.
On a aussi assisté ces dernières années à l’explosion des usurpations d’identité de sociétés reconnues ?
Certains escrocs se font passer pour des sociétés autorisées qui, la plupart du temps, ne proposent pas le placement dont ils vous parlent. Ils reproduisent leur logo, site Internet ou documents commerciaux et insistent souvent pour que vous vérifiiez leur présence sur les registres officiels afin de vous prouver leur "bonne foi". Ils n’hésitent pas non plus à utiliser les logos d’autorités publiques françaises ou étrangères pour se montrer dignes de confiance.
Faut-il se méfier de certains placements plus que d’autres ?
Les deux types d’arnaques qui sont les plus fréquentes actuellement portent sur les crypto-actifs d’une part et les usurpations d’identité d’autre part.
Mais il faut surtout se méfier des propositions de placement trop belles pour être vraies.
Par exemple rester cantonné à des placements classiques comme les livrets bancaires, l’assurance vie ou le plan d’épargne en actions (PEA) met-il les épargnants à l’abri des mauvaises surprises ?
Pas toujours, car il y a aussi des offres de faux livrets d’épargne ou encore des fausses SCPI, un placement qu’on loge dans un PEA ou un contrat d’assurance vie.
Vous voulez dire qu’aujourd’hui il faut se méfier car les escrocs sont présents sur toute la gamme des placements des plus simples aux plus complexes
Mais quid si c’est votre banquier ou conseiller habituel qui vous le propose ?
Vous devez vous assurer qu’il s’agit bien de lui, et non d’un escroc qui usurpe son identité. Attention ! Il existe aussi une recrudescence des arnaques aux faux conseillers.
Quel est le point commun de toutes ces arnaques ?
Le point commun est la promesse de gains irréalistes, avec un rendement trop beau pour être vrai. Quand on estime que les placements traditionnels rapportent peu, la tentation est grande d’essayer de trouver des solutions plus rentables. Les escrocs s’appuient dessus et utilisent internet et les réseaux sociaux pour vous attirer.
Pouvez-vous nous décrire le mode opératoire des escrocs sur Internet ?
Après vous avoir attiré sur internet ou les réseaux sociaux, ils vous orientent le plus souvent vers un site internet, bien évidemment fictif mais d’aspect professionnel et vous proposant un placement à rendement élevé sans risque. En général il y a un formulaire de contact pour pouvoir en savoir plus. Ainsi l’escroc récupère vos données personnelles et peut ensuite vous contacter, par email ou téléphone. Il va alors vous mettre en confiance pour investir. Donc dès qu’il faut remplir un formulaire pour avoir des infos sur le placement, on se méfie.
Une fois que l’on communique ses coordonnées, le piège se referme sur nous, vous voulez dire ?
Oui. Vous allez être incité à faire un premier investissement, souvent modeste, et vous réaliserez un premier gain. Si vous voulez retirer votre argent, ce sera bien sûr possible. Vous serez alors totalement en confiance et incité à investir davantage. Une fois que vous aurez suffisamment investi, vos demandes de retrait vont être refusées pour diverses raisons. Votre interlocuteur finira par devenir injoignable, il sera parti avec votre argent.
Quel conseil donnez-vous aux épargnants ?
Ne donnez pas vos coordonnées sur internet, de la même manière que vous ne les donneriez pas à un inconnu dans la rue.
Qui est concerné ? Les gens pensent que cela ne peut pas leur arriver.
Tout le monde est concerné, le profil des victimes est très divers. Une étude menée pour l’AMF en 2021 montrait que 61% des Français avaient déjà été exposés aux arnaques financières. 64% des Français pensaient également qu’ils existaient des placements non risqués plus rentables que les livrets d’épargne.
C’est vrai on est surpris de découvrir que parmi les victimes on trouve aussi bien des personnes au RSA ou au chômage, des employés que des enseignants, des chefs d’entreprise, des médecins et même des conseillers en gestion de patrimoine. Il faut bien reconnaître que les techniques des escrocs sont rodées et particulièrement redoutables.
Pouvez-vous nous en dire plus sur les procédés utilisés ?
Comme je l’ai indiqué, les escrocs vont vous mettre en confiance et c’est là qu’ils sont redoutables. Ce sont des experts de la manipulation. Une fois qu’ils seront rentrés en contact avec vous, ils seront très persuasifs.
On a aussi vu en début d’année de faux interviews d’Elise Lucet et de Djamel Debbouze faisant la promotion de sites de cryptomonnaies
Les escrocs peuvent aussi usurper l’identité de personnalités publiques, de journaux ou de chaînes d’informations renommées. Ils créent de faux sites Internet, de faux comptes sur les réseaux sociaux et y diffusent de faux articles, de fausses déclarations ou utilisent des images truquées provenant d’émissions télévisées.
Les articles impliquent des personnalités qui, au cours d’une émission, auraient soi-disant "dévoilé par erreur leur secret pour faire beaucoup d’argent". Les médias et autorités chercheraient alors coûte que coûte à cacher cette "déclaration compromettante" en coupant les images. En réalité, ces articles vous dirigent vers des sites et des placements qui sont de pures arnaques.
Face au danger et à l’ampleur du phénomène, quels sont les bons réflexes à adopter pour éviter de tomber dans une arnaque ?
Il faut être très prudent et se méfier des promesses trop belles pour être vraies. Il ne faut pas se précipiter, poser des questions à son interlocuteur, prendre le temps de la réflexion et faire des vérifications.
Si vous êtes contacté par une personne que vous ne connaissez pas, qui vous propose un placement "miracle", ne donnez pas suite à ses sollicitations.
Surtout ne versez pas de sommes d’argent, ne donnez pas votre numéro de carte bancaire et ne signez rien avant d’être certain qu’il ne s’agit pas d’une arnaque.
Certains signes peuvent-ils nous mettre la puce à l’oreille ?
Bien sûr. Tout d’abord la promesse d’un rendement élevé et sans risque, supérieur à celui des livrets d’épargne comme le Livret A. Soit une rémunération de 3 % actuellement Ou encore les messages tels que "gagnez de l’argent facilement", "1 000 euros en 1h"… Mais aussi une offre réservée à quelques privilégiés et à saisir sans attendre, proposée par une personne que vous ne connaissez pas et particulièrement sympathique
Existe-t-il des outils pour s’informer avant de s’engager ?
Oui l’AMF dispose d’un site dédié pour vous aider à vous protéger des arnaques, AMF Protect Epargne.
Sur ce site, vous pouvez notamment faire le test "Suis-je victime d’une arnaque". En 6 questions, on vous indique le risque d’arnaque.
Quid des listes noires ? Est-ce suffisant ?
Vous pouvez aussi sur ce site AMF Protect Epargne ou sur le site de l’AMF consulter nos listes noires, c’est-à-dire la liste des sociétés et sites non autorisés en France. Il ne faut donc pas investir sur un site sur liste noire.
Mais ce n’est pas parce qu’un site n’est pas sur liste noire qu’il est autorisé. Ces listes sont mises à jour régulièrement mais ne peuvent pas être exhaustives car les escrocs créent de nouveaux sites tous les jours.
Et les listes blanches ?
A contrario les listes blanches comportent les sociétés ou offres qui sont autorisées. Il y en a plusieurs. C’est sur ces listes blanches que s’appuient malheureusement les usurpateurs d’identité pour vous faire croire qu’ils sont autorisés. Il faut donc bien vérifier que tout est identique entre la société ou l’offre proposée et les listes blanches.
Que faire si l’on pense être victime d’un escroc ?
Tout d’abord, vous pouvez contacter AMF Epargne Info Service, notre centre de relations avec les particuliers pour vérifier qu’une offre est autorisée. S’il s’avère que votre interlocuteur ne dispose pas des autorisations nécessaires, et que vous avez déjà investi, vous devez alors vous adresser aux autorités judiciaires et porter plainte. Votre plainte devra être détaillée et comporter l’ensemble des éléments qui pourront faciliter le travail des autorités judiciaires.
Vous pouvez aussi en complément contacter les services qui s’affichent à l’écran.
Les victimes ont-elles une chance de récupérer leur argent ?
Il est malheureusement très difficile de récupérer les sommes volées dans le cadre d'une arnaque aux placements financiers, car bien souvent les escrocs sont basés à l'étranger.
Alors comme, il vaut mieux prévenir que guérir, quel autre conseil donner aux épargnants qui pensent avoir trouvé la martingale ?
Tout d’abord, il faut se constituer et conserver une épargne de précaution, sur un placement sans risque et disponible comme un livret d’épargne.
Une fois cette épargne de précaution constituée, vous pouvez épargner sur une durée plus longue pour réaliser vos projets.
Si vous avez du temps devant vous, au moins 10 ans, vous pouvez placer une partie de cette épargne sur les marchés financiers et en la diversifiant, sur des secteurs et des zones géographiques différents.
Comme on le dit, il ne faut pas mettre tous ses œufs dans le même panier. Et encore moins dans un placement miracle, car vous risquez de perdre toutes vos économies en tombant dans une arnaque.
Dans tous les cas, on recommande de ne pas placer plus de 5 % à 10 % de ses avoirs sur des placements risqués, comme les cryptomonnaies ou le crowdfunding. Et de n’investir que de l’argent dont on est sûr de ne pas avoir besoin à court et moyen terme… et que l’on est prêt à perdre !
Maintenant, que l’on y voit plus clair, Florence, place aux questions des internautes.
Léo nous dit qu’il a reçu un SMS l’alertant qu’une transaction était en cours pour vider son portefeuille de crypto-monnaies. Il pense que cela peut provenir d’un escroc
Les SMS ou encore les emails de personnes que l’on ne connaît pas doivent appeler à la plus grande prudence. Ne cliquez sur aucun lien, ne donnez aucune information personnelle.
Un tel SMS est probablement une arnaque. Le mieux est de contacter votre prestataire de service sur actifs numériques, celui auprès duquel vous avez investi en cryptos.
Corentin a investi sur une plateforme très connue dont il s’est avéré que l’identité avait été usurpée. Il se demande comment reconnaître à l’avenir ce type d’arnaque et s’en prémunir ?
Ces arnaques sont difficiles à reconnaître car la différence entre leur site et celui qu’ils ont usurpé va se jouer sur quelques détails comme le changement d’une lettre dans le nom ou l’adresse du site ou d’une adresse mail. La seule vérification de la présence d’une société sur les registres officiels n’est pas suffisante pour éviter les arnaques. N’hésitez pas à consulter les listes noires de l’AMF pour voir si l’usurpation a déjà été identifiée, ou à contacter l’AMF avant d’investir.
Valentin nous dit : "J’ai sympathisé avec une personne sur un site de rencontre qui m’incite à investir en crypto. Elle me dit qu’elle a gagné beaucoup d’argent. Qu’en pensez-vous ?"
Il s’agit probablement d’une arnaque à la romance. Comme je l’ai indiqué, pour vous piéger, les escrocs savent instaurer un climat de confiance. Cela peut passer par un rapprochement affectif via des sites de rencontres, des réseaux sociaux ou des messageries privées. Le profil de l’escroc paraît crédible, vous échangez plusieurs messages anodins au début.
Et ensuite ça se passe comment ?
Après quelque temps, vous remarquez deux choses :
Si vous suivez ses conseils, vous tomberez sur une arnaque bien ficelée. Ne donnez pas suite.
Dominique O : "Un influenceur que je suis, vient de dévoiler le secret de sa fortune. Comment savoir si c’est sérieux ?"
Une voiture de luxe, une grande maison avec piscine, des gains faciles et rapides sans travailler... Attention à ce que vous pouvez voir sur les réseaux sociaux ! N'oubliez pas que ce qui est partagé peut-être faux, retouché, trompeur. Interrogez-vous : s'agit-il d'un témoignage désintéressé ou d'une publicité ? Car ce n'est pas toujours précisé.
Leur intérêt peut être de vous pousser à l'investissement pour toucher une commission sur les sommes placées, voire de récupérer directement votre argent, même s’ils ne vous parlent peut-être pas d’investissement au premier contact ! Les arnaques sur les réseaux sociaux sont nombreuses. Certains influenceurs peu vigilants peuvent faire la promotion de plateformes frauduleuses.
Ingrid : "Une société me propose de l’aide pour récupérer un compte à mon nom retrouvé sur la Blockchain. Est-ce une pratique utilisée par les escrocs ?"
Il faut se méfier de tout contact non sollicité d’une personne ou d’une société que vous ne connaissez pas. Car c’est probablement une arnaque. La personne va d’abord essayer d’obtenir plus d’informations personnelles vous concernant puis vous soutirer de l’argent, en vous faisant payer des honoraires ou des taxes en échange de leur aide.
Samuel nous écrit "L’AMF me demande de payer une taxe pour récupérer mon investissement en cryptoactif ? Faites-vous ce genre de chose "
L’AMF ni aucune autre autorité publique ne proposent de service de recouvrement de fonds, que ce soit en crypto-actif ou sur d’autres types d’investissement. Si une personne vous appelle en se faisant passer pour elle, c’est une arnaque ! Des escrocs usurpent régulièrement l’identité de l’AMF et même de ses collaborateurs. J’ai moi-même été usurpée récemment et l’AMF ne perçoit pas de taxe sur les placements des investisseurs.
Oui, lors d’enquêtes pour 60 Millions de consommateurs je suis déjà tombée sur ce type d’arnaques dans l’arnaque. Les fichiers des victimes sont revendus à des escrocs spécialisés qui prétendent vouloir les aider mais en réalité sont là pour leur soutirer leurs derniers euros !
Après avoir volé votre argent dans une première arnaque, les escrocs peuvent mettre en place un nouveau piège qui consiste à se faire passer pour des avocats ou d’autres personnes soi-disant mandatées pour vous aider à recouvrer vos fonds.
Leur objectif est de vous soutirer l’argent qu’il vous resterait encore, en échange de leur aide. Mais lorsque vous êtes victime d’une arnaque, votre seule option est de porter plainte auprès des autorités judiciaires
Nous arrivons à la conclusion de notre live.
Merci Florence Corne pour vos explications et à vous tous de nous avoir suivis.
Si vous voulez faire le plein d’information et de conseils pour apprendre à reconnaître et éviter les arnaques aux placements, n’hésitez pas à consulter le site de l’Autorité des marchés financiers : amf-france.org, espace épargnants, où vous trouverez de nombreux articles et des guides, les listes noires et blanches, des alertes sur les arnaques en cours. Et, souvenez-vous, en cas de doute sur un placement, appelez la plateforme AMF Epargne Info Service au 01 53 45 62 00 (prix d’un appel local).
A bientôt.
> Consultez les fiches pratiques "Mon épargne clé en main". Celles-ci vous aident à vous poser les bonnes questions avant d'épargner et faire les bons choix de placements.
Ces fiches ont été réalisées avec l'Autorité des marchés financiers (AMF).