Actions de groupe
Actions de groupe : entrée en vigueur du dispositif le 1er octobre 2014
Mesure phare créée par la loi du 17 mars dite "Loi Hamon" (1), la première action de groupe va pouvoir être introduite dès le mercredi 1er octobre 2014. Le décret n° 2014-1081 du 24 septembre 2014 précise les modalités d'application des articles L. 423-1 et suivants du code de la consommation qui régissent ce nouvel outil au service des consommateurs.
Alors, quelle sera la première action intentée par l'une des quinze associations nationales de consommateurs agréées, seules habilitées à agir ?
Parmi les actions possibles, citons l'action contre un opérateur de téléphonie ou d'accès à Internet pour défaut de fourniture du service annoncé ou présence de clauses abusives.
Ou l'action contre une banque pour pratiques tarifaires illégales ou pour un produit financier dont le rendement annoncé n'est pas tenu. Ou bien, une action contre un opérateur ferroviaire pour cause de retards répétés.
Qu'est-ce que l'action de groupe ?
Rappelons que l'action de groupe permet à un groupe de consommateurs placés dans une situation similaire ou identique (abonnés, clients), victimes d'un manquement d'un ou des mêmes professionnels à leurs obligations légales ou contractuelles, leur ayant causé un préjudice, d'obtenir réparation par une seule action en justice.
A titre d'illustration : 500 personnes sont victimes du même professionnel qui n'a pas exécuté son obligation de livrer l'appareil commandé. Chaque consommateur devrait saisir un tribunal pour obtenir réparation, ce que peu de consommateurs feront. L'action de groupe permet à une association nationale de consommateurs agréée de saisir un tribunal pour obtenir un jugement sur la responsabilité du professionnel. Ce jugement bénéficiera ensuite aux consommateurs concernés qui pourront, après mise en œuvre de mesures de publicité, adhérer au groupe et obtenir réparation, autrement dit sans avoir eux-mêmes à saisir le juge.
Quel est le champ d'application de l'action de groupe ?
Le périmètre de l'action de groupe est réservé aux relations professionnels-consommateurs (tels que définis par l'article préliminaire du code de la consommation : " est considérée comme un consommateur toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale "). Les professionnels ou les non-professionnels (des personnes morales telles que des associations) en sont par conséquent exclus.
Les consommateurs doivent avoir subi un préjudice individuel, " ayant pour cause commune un manquement d'un ou des mêmes professionnels à leurs obligations légales ou contractuelles, à l'occasion de la vente de biens ou de la fourniture de services ou des préjudices résultant de pratiques anticoncurrentielles (par exemple, ententes entre opérateurs) ".
Le domaine couvert est très large car non limité au contentieux du droit de la consommation. Outre les contrats de consommation (vente à distance, vente hors établissement ou à domicile, contrats de téléphonie, etc.), l'action de groupe peut aussi concerner des contentieux opposant des consommateurs à une banque (tarification bancaire, services financiers, etc.) ; à une compagnie d'assurance, des locataires à un bailleur institutionnel pour perception indue de charges. Peuvent aussi être concernés des fournisseurs d'énergie, d'eau. Le préjudice réparable est quant à lui limité : seul le préjudice patrimonial résultant de dommages matériels est réparable. Ce qui exclut les préjudices corporels, le préjudice moral.
Comment se déroule la procédure ?
La procédure dite "classique" est divisée en deux phases : la phase de recevabilité et de jugement sur la responsabilité puis la phase d'indemnisation. L'action est introduite devant le tribunal de grande instance du lieu où demeure le défendeur (article R. 423-2 du code de la consommation), soit celui du siège social du professionnel incriminé. L'association qui agit, représentée par un avocat, doit exposer dans l'assignation, "les cas individuels présentés (...
) au soutien de son action" (article R. 423-3 du code de la consommation). Le juge se prononce sur la recevabilité de l'affaire et sur la responsabilité du ou des professionnels. Il ordonne des mesures de publicité de la décision, précise le délai permettant aux consommateurs d'adhérer au groupe, afin d'obtenir une indemnisation. Le consommateur pourra ensuite adhérer au groupe et obtenir réparation. Il pourra, selon les cas, s'adresser au professionnel, à l'association ou à un avocat ou huissier de justice venant assister l'association pour la liquidation des préjudices (article R. 423-5 du code de la consommation).
La loi a également créé une procédure d'"action de groupe simplifiée". Celle-ci concerne un groupe de consommateurs identifiés, ayant subi un préjudice d'un même montant : dans le jugement statuant sur la responsabilité, le tribunal peut condamner le professionnel à les indemniser directement et individuellement dans un délai et selon les modalités qu'il fixe. Afin de permettre aux consommateurs concernés de se prononcer sur l'indemnisation proposée, des mesures d'informations individuelles sont instaurées (article L. 423-10, alinéa 2, articles R. 423-8 et suivants du code de la consommation).
Toute action de groupe pourra faire d'objet d'une médiation, celle-ci étant encadrée par le juge. Seule l'association qui a introduit l'action pourra mener les discussions et, l'accord sera soumis à l'homologation du juge et fera l'objet d'une publicité pour permettre aux consommateurs d'adhérer au groupe.
(1) Pour un décryptage de cette loi, voir le tableau "Tableau synthétique des principales mesures de la loi n°2014-344 du 17 mars 2014"
Adjointe au chef de service juridique, économique et de la documentation