Location : l'expérimentation du dispositif d'encadrement des loyers


En principe, la fixation du loyer des logements mis en location est libre. Depuis novembre 2018, certaines collectivités peuvent mettre en place un dispositif d'encadrement des loyers sur leurs territoires. La ville de Paris a la possibilité de l'appliquer depuis le 14 avril 2019.


 

1 - LA FIXATION DES LOYERS : LIBRE OU ENCADREE ?

En principe, la fixation du loyer des logements mis en location est libre.

 

Dans les zones d'urbanisation continue de plus de 50 000 habitants, où il existe un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande de logements, entraînant des difficultés sérieuses d'accès au logement sur l'ensemble du parc résidentiel existant, la fixation du loyer des logements mis en location est libre. L'article 17 de la loi de 1989 pose ce principe.

 

Depuis novembre 2018, un dispositif d'encadrement des loyers pourra être expérimenté dans ces zones.

 

En effet, à titre expérimental et pour une durée de cinq ans à compter de la publication de la loi Elan, certaines collectivités pourront demander qu'un dispositif d'encadrement des loyers soit mis en place dans les zones visées précédemment. Ce dispositif est prévu par l'article 140 de la loi du 23 novembre 2018.

 

Depuis le 14 avril 2019, le dispositif d'encadrement des loyers est applicable sur le territoire de la ville de Paris. Le décret n° 2019-315 du 12 avril 2019 fixe le périmètre sur lequel l'expérimentation est applicable.

 

 

2 - L'EXPERIMENTATION DE L'ENCADREMENT DES LOYERS

Dans quelles collectivités peut être mise en place l'expérimentation de l'encadrement des loyers ?

 

Il s'agit des collectivités suivantes :

 

  • des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) compétents en matière d'habitat,
  • de la commune de Paris,
  • des établissements publics territoriaux de la métropole du Grand Paris,
  • de la métropole de Lyon,
  • et de la métropole d'Aix-Marseille-Provence.

Comment est déterminé le territoire concerné ?

Sur proposition du demandeur transmise dans un délai de deux ans à compter de la publication de la loi, un décret doit déterminer le périmètre du territoire de la collectivité demandeuse sur lequel s'applique le dispositif.
 

Certaines conditions doivent être réunies :

  1. Un écart important entre le niveau moyen de loyer constaté dans le parc locatif privé et le loyer moyen pratiqué dans le parc locatif social,
  2. Un niveau de loyer médian élevé,
  3. Un taux de logements en cours de construction ou commencés, rapporté aux logements existants sur les cinq dernières années, faible,
  4. Des perspectives limitées de production pluriannuelle de logements inscrites dans le programme local de l'habitat et de faibles perspectives d'évolution de celles-ci.

Les catégories de logements et les secteurs géographiques sont déterminés en fonction de la structuration du marché locatif constatée par l'observatoire local des loyers.

 

Le décret n° 2019-315 du 12 avril 2019 fixe le périmètre du territoire de la ville de Paris sur lequel peut être mis en place le dispositif d'encadrement des loyers.

 

Le décret est motivé comme suit : "Conformément à la délibération du conseil de Paris du 11 décembre 2018, la maire de Paris a proposé par courrier du 28 janvier 2019 que l'ensemble du territoire de la ville soit soumis au dispositif expérimental. Les quatre conditions nécessaires à sa mise en place étant remplies, le décret fixe le périmètre où est mise en place l'expérimentation, qui correspond à l'intégralité du territoire de la ville de Paris".

 

Collectivités pouvant mettre en place l’expérimentation
de l’encadrement des loyers

Texte instituant l’expérimentation

Divers établissements publics
de coopération intercommunale (EPCI)
compétents en matière d'habitat

Non en vigueur.

Paris

Décret n° 2019-315 du 12 avril 2019

Etablissements publics territoriaux
de la métropole du Grand Paris

Non en vigueur.

Métropole de Lyon

Non en vigueur.

Métropole d'Aix-Marseille-Provence

Non en vigueur.

 

Quelles sont les références permettant de déterminer le loyer applicable ?

Pour chaque territoire ainsi délimité, le représentant de l'Etat dans le département fixe, chaque année, par arrêté :

 

  • un loyer de référence,
  • un loyer de référence majoré,
  • et un loyer de référence minoré.

Ces trois références sont exprimées par un prix au mètre carré de surface habitable, par catégorie de logements et par secteur géographique.

 

  Quelques définitions

 

- Chaque loyer de référence est égal au loyer médian calculé à partir des niveaux de loyers constatés par l'observatoire local des loyers selon les catégories de logements et les secteurs géographiques.

 

- Chaque loyer de référence majoré et chaque loyer de référence minoré sont fixés, respectivement, par majoration et par minoration du loyer de référence.

 

- Le loyer de référence majoré est égal à un montant supérieur de 20 % au loyer de référence.

 

- Le loyer de référence minoré est égal au loyer de référence diminué de 30 %.

 

Comment est fixé le loyer de la location ?

Dans les territoires où s'applique l'arrêté, le loyer de base des logements mis en location estfixé librement entre les parties lors de la conclusion du contrat de bail, dans la limite du loyer de référence majoré. Une action en diminution de loyer peut être engagée si le loyer de base prévu dans le contrat de bail est supérieur au loyer de référence majoré en vigueur à la date de signature de ce contrat.

 

Dans quel cas peut être appliqué un complément de loyer ?

Un complément de loyer peut être appliqué au loyer de base pour des logements présentant des caractéristiques de localisation ou de confort le justifiant, par comparaison avec les logements de la même catégorie situés dans le même secteur géographique.
Le montant du complément de loyer et les caractéristiques du logement le justifiant sont mentionnés au contrat de bail.

 

Lorsqu'un complément de loyer est appliqué, le loyer s'entend comme la somme du loyer de base et de ce complément.

 

Un complément de loyer ne peut être appliqué à un loyer de base inférieur au loyer de référence majoré.

 

Quelle est la procédure en cas de contestation du complément de loyer ?

Le locataire qui souhaite contester le complément de loyer disposera d'un délai de trois mois à compter de la signature du bail pour saisir la commission départementale de conciliation, sauf lorsqu'il s'agit d'un bail mobilité.

 

En cas de contestation, il appartient au bailleur de démontrer que le logement présente des caractéristiques de localisation ou de confort le justifiant, par comparaison avec les logements de la même catégorie situés dans le même secteur géographique.

 

En cas de conciliation, le montant du loyer, tenant compte de l'éventuel complément de loyer, est celui fixé par le document de conciliation délivré par la commission départementale de conciliation.

 

En l'absence de conciliation, le locataire dispose d'un délai de trois mois à compter de la réception de l'avis de la commission départementale de conciliation pour saisir le juge d'une demande en annulation ou en diminution du complément de loyer. La fin de non-recevoir tirée de l'absence de saisine préalable de la commission départementale de conciliation peut être soulevée d'office par le juge.

 

Dans les deux cas, le loyer résultant du document de conciliation ou de la décision de justice s'applique à compter de la prise d'effet du bail.

 

Quel est le régime applicable aux logements meublés ?

L'arrêté fixe, pour les logements meublés soumis à la loi du 6 juillet 1989, un loyer de référence, un loyer de référence majoré et un loyer de référence minoré par catégorie de logement et par secteur géographique.

 

Ces éléments sont déterminés par l'application d'une majoration unitaire par mètre carré aux loyers de référence pour tenir compte du caractère meublé du logement. Quant à la majoration, elle est déterminée à partir des écarts constatés entre les loyers des logements loués nus et les loyers des logements loués meublés observés par l'observatoire local des loyers.

 

Le complément de loyer tient compte des équipements et services associés aux logements meublés.

 

Ces dispositions ne sont pas applicables aux logements meublés situés dans une résidence avec services gérée selon un mode d'organisation adapté aux nécessités des résidents par un mandataire unique.

 

Au plus tard six mois avant son terme, le Gouvernement remettra au Parlement un rapport d'évaluation de cette expérimentation.

 

Quelles sont les mentions du contrat de location ?

Le contrat de location précise :

 

  • le loyer de référence,
  • et le loyer de référence majoré, correspondant à la catégorie de logements.

En cas d'absence dans le contrat de location de cette mention, le locataire peut, dans un délai d'un mois à compter de la prise d'effet du contrat de location, mettre en demeure le bailleur de porter cette information au bail.

 

A défaut de réponse du bailleur dans le délai d'un mois ou en cas de refus de ce dernier, le locataire pourra saisir, dans le délai de trois mois à compter de la mise en demeure, la juridiction compétente afin d'obtenir, le cas échéant, la diminution du loyer.
 

Quelle est la procédure lors d'un renouvellement de contrat ? 

1. Une action en diminution de loyer peut être engagée si le montant du loyer fixé au contrat de bail est supérieur au loyer de référence majoré. Le loyer ainsi étudié ne prendra pas en considération le montant du complément de loyer, si celui-ci est appliqué le cas échéant.
 

2. Une action en réévaluation de loyer peut être engagée dès lors que le loyer est inférieur au loyer de référence minoré.

 

Dans ces deux cas, l'une ou l'autre des parties pourra proposer un nouveau loyer à son cocontractant :

 

  • au moins six mois avant le terme du contrat pour le bailleur
  • et au moins cinq mois avant le terme du contrat pour le locataire. Le montant du loyer de référence majoré ou minoré pris en compte correspondra à celui qui est en vigueur à la date de la proposition émise par l'une des parties.

Le nouveau loyer proposé dans le cadre d'une action en réévaluation de loyer sera inférieur ou égal au loyer de référence minoré. Le locataire pourra, par référence aux loyers habituellement constatés dans le voisinage pour des logements comparables, contester l'action en réévaluation de loyer.

 

Les loyers servant de référence devront être représentatifs de l'ensemble des loyers habituellement constatés dans le voisinage pour des logements comparables, situés soit dans le même groupe d'immeubles, soit dans tout autre groupe d'immeubles comportant des caractéristiques similaires et situés dans la même zone géographique. Le nombre minimal de références à fournir sera de trois. Toutefois, il sera de six dans les communes, dont la liste sera fixée par décret, faisant partie d'une agglomération de plus d'un million d'habitants.

 

Lorsque le bailleur fait application de cette procédure, il ne pourra donner congé au locataire pour la même échéance du contrat.

 

La notification d'une proposition d'un nouveau loyer reproduira intégralement, à peine de nullité, les dispositions de la loi et mentionne le montant du loyer ainsi que le loyer de référence majoré ou le loyer de référence minoré ayant servi à le déterminer.

 

En cas de désaccord ou à défaut de réponse du cocontractant saisi quatre mois avant le terme du contrat, l'une ou l'autre des parties pourra saisir la commission départementale de conciliation.

 

A défaut d'accord constaté par la commission départementale de conciliation, le juge pourra être saisi avant le terme du contrat. A défaut de saisine du juge, le contrat sera reconduit de plein droit aux conditions antérieures du loyer, éventuellement révisé.

 

Lorsque les parties s'accordent sur une hausse du loyer ou lorsque cette hausse est fixée judiciairement, celle-ci s'appliquera par tiers ou par sixième selon la durée du contrat. Toutefois, cette hausse s'appliquera par sixième annuel au contrat renouvelé, puis lors du renouvellement ultérieur, dès lors qu'elle sera supérieure à 10 % si le premier renouvellement avait une durée inférieure à six ans.

 

Quelles sont les conséquences du constat par le Préfet du non-respect de ces dispositions ?

Lorsque le représentant de l'Etat dans le département constate qu'un contrat de bail ne respecte pas ces dispositions, il peut mettre en demeure le bailleur, dans un délai de deux mois, d'une part, de mettre le contrat en conformité et, d'autre part, de procéder à la restitution des loyers trop-perçus. Le bailleur sera informé des sanctions qu'il encourt et de la possibilité de présenter, dans un délai d'un mois, ses observations.

 

Si cette mise en demeure reste infructueuse, le représentant de l'Etat dans le département pourra prononcer une amende à l'encontre du bailleur, dont le montant ne peut excéder 5 000 € pour une personne physique et 15 000 € pour une personne morale. Cette décision sera motivée et indiquera les voies et délais de recours. L'amende sera prononcée après que l'intéressé a été mis à même de présenter ses observations.

 

Le prononcé de l'amende ne fait pas obstacle à ce que le locataire engage une action en diminution de loyer.

 

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Virginie Potiron,

Juriste à l'Institut national de la consommation


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