Mise en œuvre des garanties légales dans les ventes de véhicules neufs ou d’occasion

Exemples de jurisprudences


Illustration de la mise en oeuvre des garanties légales dans les ventes de véhicules neufs ou d'occasion par les tribunaux.

 

 

Garantie des vices cachés - Quels défauts ?

  • Les défauts apparents décelables par un acheteur profane n’ont pas le caractère de vice caché
  • Le fait que le moteur ne soit pas d’origine ne caractérise pas sa dangerosité

 

CA Rouen, 5 janvier 2023, n° 22/01240

Véhicule d’occasion- garantie des vices cachés : non - défauts apparents au moment de la vente, décelables par un acheteur profane. Moteur non d’origine, moteur non dangereux.

 

Le 23 octobre 2019, une consommatrice achète un véhicule mis en circulation en 2002 pour un prix de 1 500 €. Le compteur affiche 231 908 km.

Le 10 juillet 2020, elle assigne le vendeur en résolution de la vente et en remboursement du prix, arguant de vices cachés affectant le véhicule. Elle invoque à la fois la garantie des vices cachés et la non-conformité du code de la consommation.

La cour d’appel casse le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Rouen, le 3 janvier 2022, prononçant la résolution de la vente pour vices cachés.

 

Les juges de la cour d’appel constatent que :

 

- Le véhicule est affecté de défauts qui étaient apparents au moment de la vente : face avant cassée, déflecteurs manquants, baie du pare-brise manquante.

- Le mauvais fonctionnement des feux et le lave-glace inopérant pouvaient être décelés au moment de la vente par un acheteur profane.

- Par ailleurs, le fait que le moteur ne soit pas le moteur d’origine ne caractérise pas sa dangerosité.

La consommatrice est également déboutée sur le fondement de la garantie légale de conformité car elle ne démontre pas en quoi le véhicule n’était pas conforme ou dangereux pendant sa période d’utilisation.

 

La consommatrice sollicite la condamnation du vendeur à lui verser 2 320,65 € au titre des réparations. Elle est déboutée de sa demande, faute d’avoir établi un manquement du vendeur à ses obligations contractuelles.

 

Garantie des vices cachés ou garantie de conformité : existence d'un défaut

  • Dans les deux cas, il faut démontrer l’existence du défaut.

 

CA Nancy, 1er février 2024, RG n° 23/00302

Véhicule neuf – LOA- rappel pour airbags défectueux- accident - vice caché : NON, défaut de conformité : NON

 

Le 17 juin 2018, une consommatrice conclut avec la DIAC (société de crédit) un contrat de LOA pour une Renault (modèle DACIA).

Le 8 janvier 2019 : Renault informe la consommatrice que l’airbag du volant peut se révéler défectueux et l’invite à se rendre dans un garage Renault pour remplacer gracieusement l’airbag.

L’airbag est remplacé le 25 avril 2019, mais entre-temps, la consommatrice a eu plusieurs accidents. Elle informe Renault que les airbags n’ont pas fonctionné.

Le 31 juillet 2019, un rapport d’expertise constate l’absence de défaut : les réparations ont été effectuées et l’airbag frontal a été remplacé.

Le 22 juillet 2020 : la consommatrice assigne Renault sur le fondement de la garantie légale de conformité pour obtenir la résolution de la vente, l’annulation du contrat de LOA et le remboursement des loyers versés ainsi que des dommages et intérêts en réparation des séquelles subies à cause de la défaillance des airbags.

Le 9 janvier 2023, elle est déboutée par le tribunal judiciaire de Nancy.

La consommatrice fait appel.

Les juges d’appel confirment la décision du tribunal judiciaire de Nancy et déboutent la consommatrice.

Les juges rappellent que la DIAC a délégué à la consommatrice tous les droits et actions résultant du bon de commande.

La preuve d’un dysfonctionnement de l’airbag n’est pas rapportée. Renault a envoyé un courrier de rappel à titre préventif qui ne saurait induire l’existence d’un dysfonctionnement.

 

De plus, l’expert relève que les accidents ont été provoqués par des chocs latéraux alors que l’airbag volant, objet du rappel, est appelé à fonctionner en cas de choc frontal.

 

- Sur le fondement de la garantie des vices cachés : l’existence du vice n’est pas démontrée.

- Sur le fondement de la garantie légale de conformité, le dysfonctionnement de l’airbag volant n’est pas démontré. De plus, il a été remplacé par Renault,

- Sur les dommages et intérêts : en l’absence d’une faute du vendeur, la consommatrice ne peut prétendre au versement de dommages et intérêts.

 

La consommatrice est déboutée de sa demande en résolution de la vente et du contrat de location avec option d’achat ainsi que de sa demande de remboursement des loyers.

 

Expertise - conditions de recevabilité

  • Garantie légale des vices cachés : l’acquéreur doit apporter la preuve de l’origine du vice caché.
  • Le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise amiable non contradictoire. Sauf si elle est corroborée par un autre élément de preuve.

 

Cass. com., 5 octobre 2022, n° 20-18709

Le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l’une des parties, que si les conclusions sont corroborées par un autre élément de preuve (par exemple un constat d’huissier qui confirme la cause des dommages et l’existence du vice avant la vente).

CA Grenoble, 10 janvier 2023, n° 21/02323

Rappel du principe : le juge ne peut se fonder exclusivement sur les conclusions d’une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l’une des parties à laquelle l’une des parties régulièrement appelée n’a pas participé.

Ce n’est pas le cas lorsque le défendeur a chargé son compagnon de la représenter aux opérations d’expertise amiable diligentées par l’assureur de protection juridique du demandeur. Le rapport d’expertise amiable constitue une preuve recevable.

CA Grenoble, 25 juin 2024, RG n° 22/04477

Le vendeur automobile ne peut invoquer à son profit la règle selon laquelle le juge ne peut se fonder exclusivement sur les conclusions d’une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l’une des parties à laquelle l’autre n’a pas participé. Seul l’acquéreur (qui n’avait pas participé à l’expertise) aurait pu le faire.

CA, Aix en Provence, 3 avril 2024, RG nº 22/10631

Une consommatrice mandate un cabinet d’expertise, qui rend un rapport le 18 novembre 2021, non contradictoire, les autres parties n'ayant pas été convoquées (leur simple convocation quoiqu'elle n'ait pas entrainé leur présence ayant rendu cette expertise contradictoire), réalisé plus de trois ans après la vente, alors que le véhicule acquis neuf présentait plus de 17 000 km.

Ainsi, ce rapport ne saurait rapporter la preuve des vices allégués, d'autant que si le juge ne peut refuser d'examiner une pièce régulièrement versée aux débats et soumise à la discussion contradictoire, il ne peut se fonder exclusivement sur une expertise réalisée à la demande de l'une des parties.

 

Garantie des vices cachés - conséquences de la réparation du vice caché

  • La réparation du vice caché ne permet plus d’invoquer la résolution ou la réduction du prix, mais demander des dommages et intérêts reste possible.

 

Cass. civ. 1, 14 décembre 2022, pourvoi n° 21-20809

Véhicule occasion : pannes réparées – la garantie des vices cachés ne peut plus être invoquée, mais les dommages et intérêts peuvent être demandés

 

Le 29 novembre 2013, un consommateur acquiert un véhicule d’occasion qui subit 12 pannes entre la date de son achat et le 12 juillet 2014.

Le consommateur se retourne contre le vendeur en invoquant la garantie légale des vices cachés.

La cour d’appel rejette sa demande au motif que le véhicule a été correctement réparé à chaque panne, de sorte qu’il ne présente pas "d’impropriété à l’usage auquel il est destiné".

 

L’arrêt est cassé par la Cour de cassation :

 

- L’acheteur d’une chose comportant un vice caché, qui accepte la remise en état de ce bien, ne peut plus invoquer l’action en garantie des vices cachés dès lors que le vice a disparu.

- Il peut cependant solliciter l’indemnisation du préjudice éventuellement subi du fait de ce vice.

 

Garantie des vices cachés - Le vendeur professionnel est présumé connaître les défauts de la chose, il doit verser des dommages et intérêts.

 

CA Paris, 13 avril 2023, RG n° 21/17731

Véhicule occasion – vices cachés démontrés- résolution de la vente- vendeur professionnel : dommages et intérêts

 

Le 10 octobre 2019, une société vend à un consommateur un véhicule Mercedes d’occasion pour un montant de 13 200 €.

Le 22 octobre 2019, à la suite d’un contrôle technique qui révèle des défaillances mineures et majeures, le consommateur demande par courrier au vendeur de réparer le véhicule ou de lui rembourser le prix de vente.

Un devis de réparation chiffre les réparations nécessaires à 11 877,76 €.

Le 26 novembre 2019, l’acheteur demande par LRAR la résolution de la vente puis met en demeure le vendeur de lui restituer la somme perçue pour l’achat du véhicule.

Le 30 mars 2020, il fait réaliser une expertise amiable à laquelle le vendeur a été convoqué par courriers recommandés, mais ne s’est pas présenté. L’expert conclut à l’existence d’anomalies et de dysfonctionnements.

Les mises en demeure sont restées infructueuses. Le 29 septembre 2020, le consommateur assigne le vendeur devant le tribunal judiciaire d’Évry.

Le 3 mai 2021, le tribunal judiciaire d’Évry déboute l’acheteur. Celui-ci fait appel.

 

Le 13 avril 2023, les juges de la cour d’appel de Paris condamnent le vendeur sur le fondement de la garantie des vices cachés.

 

- La plupart des défaillances n’étaient pas visibles ou seulement par un professionnel.

- Elles caractérisent une impropriété du véhicule à sa destination, l’acquéreur souhaitant utiliser son véhicule sans avoir à procéder des réparations et présenter son véhicule à des contre-visites.

- Les défauts ont été constatés 13 jours après la vente, ils existaient au moment de la vente.

- L’acheteur n’aurait pas acheté ce véhicule ou en aurait offert un moindre prix s’il avait connu ces défauts.

 

Les juges confirment que l’expertise a été menée contradictoirement puisque le vendeur a été convoqué, mais ne s’est pas présenté.

Les juges prononcent la résolution de la vente avec restitution du prix de vente (13 200 € avec intérêts légal à compter du 22 octobre 2019, date de la première mise en demeure). La condamnation est assortie d’une astreinte de 50 € par jour de retard au-delà du mois précité.

Par ailleurs, les juges relèvent que le vendeur, vendeur professionnel, est réputé connaitre l’état exact du véhicule. L’acquéreur peut prétendre à des dommages et intérêts qui viennent réparer des dommages préjudiciables et n’ont pas un caractère punitif.

Ainsi, l’acheteur sera indemnisé pour le devis établi pour lister les défaillances (90 €), l’assurance du véhicule (1 147,20 €), le préjudice de jouissance, il n’a pu conduire sa voiture quotidiennement (5 000 €), le préjudice moral, il s’était adressé à un professionnel pour être garanti de la bonne qualité du véhicule (1 000 €). Le total des dommages et intérêts s’élève à 7 237,20 €.

En revanche, l’acheteur ne justifie pas le règlement des frais d’expertise (570 €) et ne sera pas indemnisé pour cette dépense.

 

Garantie des vices cachés : présomption irréfragable de connaissance des défauts cachés par le vendeur professionnel- pas d'atteinte disproportionnée au droit de la preuve et pas de méconnaissance du droit au procès équitable garanti par la convention EDH.

 

Cass. com, 5 juillet 2023, pourvoi n° 22-11621

Le vendeur professionnel condamné à des dommages et intérêts soutenait que la présomption irréfragable de connaissance des défauts cachés qui pèse sur le vendeur professionnel porte atteinte disproportionnée au droit à la preuve et méconnait ainsi le droit au procès équitable garanti par l’article 6 §1 de la Convention EDH.

Argument rejeté par les juges de la Cour de cassation : ils rappellent que le caractère irréfragable de connaissance des vices par le vendeur professionnel résulte d’une jurisprudence ancienne et constante qui l’oblige à réparer l’intégralité des préjudices de tous les dommages causés par le vice caché.

Les juges précisent que cette présomption irréfragable est fondée sur le postulat que le vendeur professionnel connait ou doit connaitre les vices de la chose vendue. Cela contraint …le vendeur, qui possède les compétences lui permettant d’apprécier les qualités et les défauts de la chose à procéder à une vérification minutieuseavant la vente, pour répondre à l’objectif légitime de protection de l’acheteur qui ne dispose pas des mêmes compétences… Ainsi, il n’y a pas d’atteinte au droit du vendeur professionnel au procès équitable.

 

Garantie des vices cachés : le vendeur non professionnel n’est condamné à des dommages et intérêts que s’il est démontré qu’il connaissait le vice.

 

CA Montpellier, 5 janvier 2023, n° 20/01323

Véhicule occasion- Garantie des vices cachés : oui- Usure du turbo-compresseur antérieure à la vente : vice caché. Connaissance du vice par le vendeur non professionnel non démontrée : pas de dommages et intérêts

Le 5 octobre 2014, un consommateur achète un véhicule à un particulier. Le véhicule affiche 168 765 km au compteur et son prix est de 4 000 €.

Le 23 décembre 2014, après avoir parcouru 900 km, le moteur lâche. Le consommateur tente en vain de trouver une solution amiable avec le vendeur.

Le 28 octobre 2018, il assigne le vendeur devant le tribunal d’instance de Perpignan sur le fondement de la garantie des vices cachés. Le tribunal le déboute au motif que le véhicule était apte à rendre les services que l’on attend avec un véhicule de plus de 10 ans avec un kilométrage important.

La décision est infirmée par les juges de la cour d’appel.

Le rapport d’expertise a constaté que la casse du moteur provient d’une usure du turbocompresseur antérieure à la vente. Le véhicule n’est économiquement pas réparable. Les juges de la cour d’appel estiment que l’usure du turbo compresseur est constitutive d’un défaut caché …qui a rendu le véhicule impropre à l’usage auquel il était destiné à savoir effectuer des déplacements…l’acheteur ne l’aurait manifestement pas acquis ou n’en aurait donné qu’un moindre prix s’il les avait connus.

Le vendeur est condamné à rembourser le prix de vente au consommateur. Sa connaissance du défaut (ou mauvaise foi) n’est pas démontrée, il n’est pas tenu à verser des dommages et intérêts (article 1645 du code civil).

 

Garanties légales et véhicule d’occasion :  la distinction entre usure normale et défaut relève de l’appréciation souveraine des juges du fond

 

CA Chambéry, 5 octobre 2023, n° 21/01802

Véhicule d’occasion : usure normale - pas de résolution de la vente pour vice caché.

Un consommateur achète un véhicule d’occasion transformé en camping-car affichant 371 899 km au compteur, pour un montant de 10 000 €.

 

Très rapidement, le véhicule présente un comportement anormal sur la route et un devis de réparation chiffre à 2 791,46 € le montant des réparations nécessaires.

Après échec des négociations amiables avec le vendeur, le consommateur saisit le tribunal judiciaire d’Annecy qui le déboute de sa demande de résolution de la vente avec dommages et intérêts.

 

Le consommateur fait appel en listant tous les défauts constatés.

 

Les juges d’appel confirment la décision des juges du tribunal judiciaire d’Annecy et déboutent le consommateur de sa demande de résolution de la vente.

 

- Le consommateur était au courant que le véhicule avait été transformé de façon artisanale en camping-car. Aucun défaut de conformité ni de vice caché ne peut être retenu.

- Le véhicule est un bien d’occasion totalisant 371 899 km pour lequel le consommateur a obtenu une ristourne importante (- 4 500 €) : il n’y a pas de défaut de délivrance conforme ou d’existence de vices cachés. Les pannes ou défauts sont en lien avec l’état général d’un bien de 17 ans nécessitant le renouvellement périodique de ses pièces d’usure courante.

 

CA Pau, 28 mai 2024, RG n° 22/02829

Véhicule d’occasion, panne moins de 3 mois après la vente - garantie légale de conformité. Réparation ou remplacement non mis en œuvre - résolution du contrat

Le 21 décembre 2019, un professionnel vend une BMW affichant 284 775 km pour un montant de 9500 euros à un consommateur.

Le 6 mars 2020, le filtre à particules tombe en panne et le devis de réparation s’élève à 1 690,55 euros.

Une expertise amiable sollicitée par l’assurance de protection juridique des acquéreurs révèle que le véhicule présente des défauts importants qui mettent en cause sa conformité. Le montant des réparations nécessaires est chiffré à 7 356,11 euros.

 

Pour les juges de la cour d’appel :

 

- Les défaillances des injecteurs, du sélecteur de vitesse de la boite auto, du système de préchauffage, du filtre à carburant et des thermostats de refroidissement moteur, du filtre à particules, l’usure et la défaillance du filtre à particule, les connecteurs oxydés, et l’isolant de la porte arrière droite HS entrainant une entrée d’eau sont des désordres importants qui mettent en cause la conformité du véhicule qui ne peut plus en l’état assurer l’usage pour lequel il est destiné.

 

- Le véhicule d’occasion est couvert par la garantie légale de conformité et la présomption d’antériorité du défaut de 6 mois s’applique (applicable à l’époque des faits).

 

- Le vendeur n’apporte pas la preuve contraire et l’expertise montre que les défaillances sont en lien avec un défaut d’entretien et de préparation du véhicule antérieur à la vente.

 

- Ni l’âge du véhicule ni son kilométrage n’exonèrent le vendeur de sa garantie de conformité.

 

- Le consommateur est fondé à demander à son choix la réparation ou le remplacement du véhicule.

 

- Le garage vendeur n’a pas répondu aux demandes du consommateur. Le consommateur est fondé à demander la résolution de la vente.

 

- Les juges d’appel condamnent le garage vendeur sur le fondement de l’article L. 217-10 du code de la consommation (dans sa version applicable à l’époque des faits) à restituer au consommateur le prix de vente du véhicule (9 500 €) contre remise de celui-ci, et à rembourser les frais d’immatriculation (348 €) et de dépannage (117,78 €).

 

- Le consommateur invoque un préjudice de jouissance sans apporter de justificatifs. Il est débouté de sa demande.

 

CA Montpellier, 4 juillet 2024,  RG n° 23/05241

Véhicule occasion - Vice caché : non, défaut de conformité : oui

 

Le 13 janvier 2019, une consommatrice achète un véhicule Mercedes d’occasion, affichant un kilométrage de 237 989 km moyennant la somme de 3 000 €. Le véhicule tombe en panne le 15 mai suivant, soit 4 mois plus tard.

La consommatrice assigne le vendeur pour obtenir la résolution de la vente.

La cour d’appel confirme la décision du tribunal judiciaire de Montpellier.

 

Sur le fondement de la garantie des vices cachés : la consommatrice est déboutée. En effet, les juges d’appel rappellent que l’acquéreur doit établir l’existence d’un vice, sa gravité et son antériorité à la vente. Or l’expert judiciaire a observé qu’il ne pouvait être déterminé avec certitude que le vice était antérieur à la vente. Le fait d’indiquer que "le défaut est apparu peu de temps après la vente et qu’il n’est pas la conséquence d’une usure normale ou d’un mauvais usage du véhicule" n’est pas de nature à établir l’antériorité exigée pour la mise en œuvre de la garantie légale des vices cachés.

 

Sur le défaut de conformité

Selon l’article L. 217-7 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au litige, les défauts qui se révèlent dans le délai de 6 mois à compter de la délivrance sont présumés être antérieurs à la vente , sauf preuve contraire apportée par le vendeur.

Le vendeur soutient que le contrôle technique n’a fait apparaitre aucun défaut sur le moteur et que l’acquéreur a fait un usage anormal du véhicule en parcourant plus de 9 000 km en 4 mois.

Les juges rappellent qu’un contrôle technique ne constate que les défauts apparents. Un véhicule acquis auprès d’un professionnel tombé en panne au bout de 4 mois et hors d’usage après avoir parcouru seulement 9 000 km est impropre à l’usage attendu d’un bien semblable.

Les juges font droit à la demande de résolution sur le fondement de la garantie de conformité, la réparation du véhicule n’étant pas envisageable au regard de son coût supérieur à la valeur vénale du bien.

Les juges condamnent le vendeur à verser des dommages et intérêts pour les frais d’assurance 1 307,57 € qui ont continué à courir depuis le jugement de première instance.

L’acquéreur est débouté de sa demande de prise en charge des frais de gardiennage, faute de justificatifs. De même, sa demande en indemnisation au titre de la résistance abusive est rejetée ainsi que sa demande de prononcé d’astreinte.

 

CA Besançon, 25 avril 2024, RG n° 23/00191

 

Véhicule d’occasion – mauvais état général contrôle technique avec contre-visite- prix négocié

Vice caché : non - Défaut de conformité : non - Délivrance non conforme : non

 

Un couple passe commande d’un véhicule d’occasion de 144 206 km pour la somme de 4 000 €. Le contrôle technique effectué le 4 juillet 2019 mentionne des défaillances majeures et mineures nécessitant une contre-visite à effectuer dans les deux mois. Ces documents ont été remis à l’acquéreur au moment de la vente.

Le 6 juillet 2019, le véhicule est livré, facturé et intégralement payé.

Les acquéreurs constatent des désordres. Après avoir sollicité une expertise auprès de leur assureur de protection juridique, ils assignent le vendeur pour obtenir la nullité de la vente avec restitution du prix.

Le tribunal judiciaire de Lons-le-Saunier les déboute. Les acquéreurs font appel.

Les juges d’appel confirment la décision des premiers juges :

 

- Sur le fondement de la garantie des vices cachés :

Un rapport d’expertise judiciaire, bien que listant de nombreux défauts sur le véhicule, conclut que la majeure partie des désordres relevés sont d’ordre esthétique ou concernent des équipements non liés à la sécurité. Certains d’entre eux étaient détectables avant l’achat, le véhicule étant en très mauvais état. À la lecture du contrôle technique, les acquéreurs ont pu se convaincre eux-mêmes des désordres et devaient s’attendre à un usage limité du véhicule. Le vice caché n’est pas démontré.

 

- Sur le fondement de la garantie légale de conformité :

Les acquéreurs soutiennent qu’ils ont fait le choix d’acquérir le véhicule avec les défauts connus et pas ceux qui sont apparus postérieurement. Le vendeur mentionne qu’ils ont acquis en connaissance de cause après avoir négocié le prix. Le défaut de conformité n’est pas démontré.

 

- Sur le fondement de la délivrance conforme :

Les acheteurs ne peuvent pas circuler avec le véhicule, en l’absence du certificat d’immatriculation.

Le vendeur n’a pas remis le coupon de carte grise ni le certificat d’immatriculation, parce que

les acquéreurs n’ont pas effectué les réparations visées au contrôle technique nécessaires à l’établissement de la carte grise. Le manquement à l’obligation de délivrance du vendeur n’est pas démontré.

 

Garantie légale de conformité- Exemples et conséquences de défaut de conformité affectant un véhicule neuf :

 

CA Toulouse, 10 septembre 2018, RG n° 16/013631

Véhicule neuf- buée et fines gouttelettes à l’intérieur des phares – défaut de conformité – absence de solution mise en œuvre dans le délai d’un mois - résolution de la vente

 

En 2011, un consommateur achète un véhicule neuf Mercedes moyennant le prix de 74 785 €. Peu de temps après la livraison, il constate de la buée à l’intérieur des phares qui persiste malgré 3 interventions.

En 2012, il assigne le vendeur devant le tribunal de grande instance de Toulouse sur le fondement de la garantie légale de conformité et des vices cachés afin d’obtenir la résolution de la vente, résolution du prêt et indemnisation du préjudice subi. Le tribunal accède à sa demande.

 

Les juges de la cour d’appel confirment la décision du Tribunal de grande instance de Toulouse :

 

- La présence de buée et de fines gouttelettes à l’intérieur des phares, apparue dans les 6 mois de la livraison, constitue un défaut de conformité au regard des articles L. 211-5 et L. 211-7 du code de la consommation (applicables à l’époque des faits), « en ce que le véhicule n’est pas propre à l’usage attendu d’un véhicule de luxe acquis neuf, quand bien même ce désordre n’affecte pas le faisceau lumineux… ni la visibilité du conducteur et n’empêche pas le véhicule de circuler sans danger ».

 

- Aucune des interventions n’a pu remédier au problème et aucune solution de réparation durable n’a été mise en œuvre dans le délai d’un mois suivant la réunion d’expertise amiable contradictoire. Ce défaut de conformité qui n’est pas mineur justifie de prononcer la résolution de la vente conformément au choix exprimé par le consommateur, malgré la disproportion manifeste existant entre le coût de la réparation provisoire proposée (4 600 €) et la valeur d’achat du véhicule à restituer (74 785 euros).

 

- La résolution de la vente entraine de plein droit la résolution du contrat de crédit affecté.

 

- Le préjudice pour l’acquéreur est évalué à 1 500 € (tracasseries liées aux démarches pour trouver une solution technique puis pour obtenir la résolution de la vente).

 

- Le préjudice pour le prêteur est estimé à 5 000 € (perte définitive des frais de dossier, cotisation d’assurance…).

 

- Le préjudice personnel du vendeur qui obtient la restitution du véhicule sans pouvoir réclamer à l’acquéreur une indemnité en raison de l’utilisation (9 100 km) est estimé à 37 500 euros.

 

CA Paris, 18 janvier 2024, RG n° 21/01766

Véhicule neuf - acheteur consommateur : application de la garantie de conformité du code de la consommation- coût du remplacement disproportionné par rapport à celui de la réparation- remboursement du coût des réparations

 

Le 31 mai 2018, une consommatrice acquiert auprès d’un garage, un véhicule neuf Ford, au prix de 45 500 €. Le véhicule est livré le 19 septembre 2018.

Le jour de la livraison, la consommatrice relève des défauts en présence du personnel de la concession et les confirme par mail (rayures sur l’ensemble du véhicule, taches vertes à l’intérieur, éclat blanc et rayures, toiture enfoncée, dommages sur les languettes en aluminium et en plastique, porte intérieure abimée …).

Le garage propose de reprendre le véhicule pour procéder aux réparations et de prêter un véhicule pendant la durée des réparations.

La consommatrice n’accepte pas cette proposition. Elle invoque des défauts de conformité sur le fondement de l’article L. 217-9 du code de la consommation (version applicable aux faits), et demande en vain, le remplacement du véhicule.

Elle assigne celui-ci devant le tribunal judiciaire de Melun qui la déboute. La consommatrice fait appel.

Les juges de la cour d’appel rappellent que la garantie légale de conformité peut être invoquée par l’acheteur agissant en qualité de consommateur. Le fait que la consommatrice indique dans un courrier qu’elle exporte des véhicules Ford depuis 20 ans et qu’elle achète ce véhicule pour « importer à l’international » ne peut suffire à lui attribuer la qualité de professionnel en l’absence de tout autre élément établissant que ce véhicule aurait été acquis dans le cadre de son activité professionnelle, au demeurant inconnue. La consommatrice est fondée à se prévaloir des dispositions du code de la consommation.

 

Sur le fondement de l’article L. 217-9 du code de la consommation (version applicable aux faits), permettant à l’acheteur de demander la répartition ou le remplacement du bien, sous réserve que ce choix n’entraine pas un coût disproportionné compte tenu de la valeur du bien ou de l’importance du défaut, les juges d’appel constatent que :

 

- La consommatrice n’a pas permis au garage de procéder aux réparations.

- Le coût de remplacement du véhicule (45 500€) est manifestement disproportionné par rapport aux défauts mineurs d’ordre esthétique (réparations évaluées par la consommatrice à 11 493,22€).

- C’est à bon droit que les juges du tribunal judiciaire de Melun ont débouté la consommatrice de sa demande de remplacement du véhicule.

 

L’évaluation du coût des réparations se fera sur la base de la moyenne des deux devis présentés correspondant aux désordres dénoncés le jour de la réception. Le garage est condamné à verser à la consommatrice la somme de 10 812 € au titre des réparations des défauts de conformité.

 

La consommatrice est déboutée de sa demande de réduction d’une partie du prix, celle-ci n’étant possible que si la réparation et le remplacement sont impossibles, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

Elle est également déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral, car elle ne justifie pas de sa réalité. Les juges rappellent par ailleurs qu’elle a refusé de présenter au garage le véhicule litigieux.


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